De l’année de sa création à l’année 2015, ce sont 350 ans de service qui ont été accomplis. Depuis le XIX siècle, la Poste aux armées a été engagée à de multiples reprises : expédition d'Espagne en 1823, conquête de l'Algérie 1830 - 1847 et du Maroc 1904-1934, Crimée 1954, Madagascar 1895-1897, Syrie 1820-182, expédition de Norvège en 1940, Fezzan 1942, Lybie-Cyrénaïque 1942, Corée 1950-1953, Indochine 1950-1953, Indochine 1946-1954 où 15 postiers militaires sont morts pour la France, guerre d'Algérie 1954-1962 pendant laquelle 9 postiers militaires sont également tombés au champ d'honneur.
Un peu d'Histoire
- Cavaliers et Poste aux armées Au Moyen-âge, les défauts tactiques sont similaires à ceux de l’époque romaine. Les chefs sont en première ligne, sans vue d’ensemble du champ de bataille. Occupés à combattre, ils perdent tout avantage de manœuvre.
Du Guesclin est le premier à se soucier de la liaison entre les unités combattantes. Il envoie des aides de camp porter, au grand galop, des ordres sur de courtes distances. Les informations ainsi exploitées lui permettent de prendre l’avantage sur ses adversaires. L’emploi des cavaliers va s’étendre et prendre de l’ampleur car au Moyen-âge, aucun autre réseau de transport n’a été développé depuis la chute de l’empire romain.
Ainsi, les cavaliers vont rester le principal moyen de communication des dirigeants, et cela jusqu’au XVIIIe siècle. Ces agents de communication, dépêchés par des aides de camp, prennent au fil du temps diverses appellations dont celle de poste royale.
Pour acheminer la correspondance, Louis XI crée en 1477 un système de relais distants de 7 miles : c’est la poste aux chevaux, qui vient en parallèle aux réseaux des universités et des monastères, privés et très lucratifs.
Henri IV, quant à lui, s’emploie à mettre en place un réseau d’Etat pour concurrencer les postes privées. Le courrier privé est alors acheminé via les fermes postales. La poste aux armées s'enracine ensuite dans l'histoire. Instaurée par Louvois ,surintendant des postes et secrétaire d'Etat à la guerre de Louis XIV au XVIIe siècle pour la prise en charge de la transmission des correspondances entre le commandement militaire et le roi, la Poste aux armées est tel un phœnix. En effet, elle renait de ses cendres à chaque fois que les armées nationales sont en campagne.
Après la Révolution, elle a élargi ses attributions et figé les conditions de son existence : « les emplacements et les mouvements des troupes en opérations doivent être tenus secrets.
- Napoléon et la poste aux armées Face aux conflits à travers l'Europe et à l'importance de l'armée mise en place par Napoléon, il était important pour ce dernier de pouvoir s'appuyer sur une poste simple et efficace. Pour cela, il s'appuiera sur l'organisation postale mise en place suite à la révolution française. Il nommera le 19 mars 1804 le comte de Lavalette (Marie Chamans de Lavalette) responsable du service des Postes, avec le grade de commissaire général.
La poste des armées sera une poste d'état basée sur une organisation hiérarchique. Un directeur des postes est nommé pour chaque armée de campagne. Ce dernier a pour mission de recruter le personnel nécessaire, tous civils. Le personnel ainsi recruté a pour fonction de récupérer le courrier dans les bureaux de poste les plus proche des bataillons et de le transmettre au quartier général. Les commis répartissent ensuite le courrier entre les différents bataillons où un militaire : le vaguemestre effectue la distribution. Les soldats doivent payer les frais de port du courrier en France. Au-delà le transport reste gratuit.
Antoine-Marie Chamans, comte de Lavalette sera nommé commissaire général des Postes le 17 novembre 1801, puis il deviendra directeur général des Postes le 19 mars 1804 (jusqu'en 1815) lors de l'avènement de l'empire.
Il sera à l'origine de la création des estafettes mises en place le 15 août 1805. Il s'agit de messagers à chevaux spécialement dédiés au transport du courrier impérial.
Les maîtres de Poste ont la charge de cette organisation en envoyant des postillons de relais en relais afin de transporter un portefeuille fermé à clef dont Napoléon et Lavalette ont chacun une clef. Le postillon transporte également un livret ou est inscrit par les maîtres de poste le nom de relais avec les heures de départs et d'arrivées.
Bien que très couteux, ce service est efficace. Il permet de réduire les distances. Le premier réseau reliera en 1805 Paris à Milan. Plusieurs lignes seront créées notamment entre Paris et Madrid, Paris et Hambourg en 1810 ou bien Paris et Amsterdam en 1811.
Lavalette attribue l'invention de ce service à Napoléon, bien que ce mode de transport correspond à ce qui avait été mis en place en 1803 avec les « courriers du gouvernement » ou plus tôt les « chevaucheurs de l'écurie du roy » qui de relais en relais transportaient le plus rapidement possible le courrier officiel. Lavalette écrira « c'est à l'époque de 1805 que je fis usage en grand du système des estafettes que l'Empereur me commanda d'organiser et dont les bases lui appartenaient ».
Napoléon avait senti l'inconvénient de faire franchir à un seul homme d'énormes distances. Il arriva plusieurs fois que des courriers excédés de fatigue ou mal servis n'arrivaient pas au gré de son impatience. Il ne lui convenait pas non plus de mettre entre les mains d'un seul homme des nouvelles dont la prompte réception pouvait avoir une influence grave et quelquefois décisive sur les événements les plus importants.
« j'organisai donc par son ordre le service d'estafettes qui consistait à faire passer par les postillons de chaque station les dépêches de cabinet enveloppées dans un portefeuille dont nous avions, lui et moi, chacun une clef. Chaque postillon transmettait à la station suivante un livret où le nom de chaque poste était inscrit et où l'heure de l'arrivée et du départ devait être relatée. Une amende et des peines sévères, suivant la récidive, punissaient la perte du livret et la négligence du maître de poste à inscrire l'heure de l'arrivée et du départ. J'eus beaucoup de peine à obtenir l'exécution de ces formalités. Mais avec une surveillance active et constante j'en vins à bout et ce service s'est fait pendant onze ans avec un succès complet et des résultats prodigieux. Je pouvais me rendre compte d'un jour de retard dans l'espace de 400 lieues. L'estafette partait et arrivait tous les jours de Paris et aux points les plus éloignés, Naples. Milan, les Bouches du Cattaro, Madrid, Lisbonne et par suite Tilsitt, Vienne, Presbourg et Amsterdam. C'était d'ailleurs une économie relative, les courriers coûtaient par poste 7 f 50, l'estafette ne coûtait pas 3 francs. L’Empereur recevait le huitième jour les réponses écrites aux lettres à Milan et le quinzième à Naples. Ce service lui fut très utile. Il fut, je puis le dire sans vanité, un des éléments de ses succès ».
Ce service d'estafettes sera maintenu après la chute de l'Empire jusqu'en 1872 et d'autres lignes seront même créées par exemple entre Paris et Le Havre en 1818.
Le décret de Berlin sera signé par Napoléon le 21 novembre 1806 et sera publié au journal officiel le 5 décembre. Ce décret met en place et de façon officielle, le blocus continental contre le Royaume-Uni en l'empêchant de commercer avec l'Europe. L'article 2 de ce décret interdira toute forme de correspondance avec le Royaume-Uni : « Tout commerce et toute correspondance avec les îles britanniques sont interdits. En conséquence les lettres ou paquets adressés ou en Angleterre ou à un Anglais, ou écrits en langue anglaise n'auront pas cours aux postes et seront saisis ». Il écrira le 1er décembre 1806 à Martin Michel Charles Gaudin, son ministre des finances : « faites une circulaire et prenez des mesures pour que, dans l'étendue de l'Empire toutes lettres venant d'Angleterre ou écrites en anglais et par des Anglais soient mises au rebut. Tout cela est fort important, car il faut absolument isoler l'Angleterre ».
La Poste aux armées sera réorganisée le 31 août 1809 par la mise en place d'une organisation spécifique aux deux plus importants quartiers généraux. Ils auront un directeur à leur tête, responsable de douze courriers, de vingt-trois chevaux et de dix malle-postes. Puis tous les corps d'armée seront dotés d'un directeur, d'un courrier, de deux employés et d'une malle-poste. Les lettres envoyées par les soldats sont appelées les « lettres de cantinières ». En effet les lettres avec des en-têtes Napoléoniennes (l'empereur et l'impératrice y étaient représentés) et coloriées à la main seront vendues aux soldats par les cantinières qui accompagnent les troupes en campagne. Mais la plupart des soldats étaient illettrés, leurs lettres étaient donc écrites par une autre personne.
- Première guerre mondialeLa Poste aux armées se retrouve rapidement au bord du gouffre après les premières semaines de combats Elle est totalement impréparée à ceux-ci qui tranchent radicalement avec ceux de la guerre franco-prussienne de 1870, base sur laquelle elle reprend vie. La guerre de mouvement des premiers mois, inattendue en comparaison des combats de sièges connus 44 ans plus tôt, fait exploser l'organisation héritée de cette époque. C’est une organisation asphyxiée d'emblée.
Sur le plan de l'organisation et de la hiérarchie, l'illogique règne bien avant l'engagement dans le conflit. Au sein du grand ensemble de l'intendance militaire, qui regroupe entretien, artillerie, génie, santé et soins vétérinaires, la Poste voisine avec la Trésorerie, à laquelle elle a été réunie par un décret de 1877, puis une instruction de 1891 ; autrement dit, le courrier se mélange aux soldes. Une autre instruction de mai 1912 régit le service postal en temps de guerre. Celui-ci a pour mission d'acheminer vers l'armée en campagne, les lettres qui viennent de l'intérieur du pays, appelé « courrier montant », et de faire parvenir au pays les lettres émanant de l'armée, dit « courrier descendant ». Dès avant l'ouverture des hostilités, les militaires eux-mêmes avaient laissé poindre leur scepticisme : « Le service trésorerie et postes s'occupe donc de deux questions dissemblables, d'où l'idée d'une dissociation possible. La loi est déposée, mais pas votée... donc elles opèrent encore ensemble », ainsi que le décrit une conférence de l'école d'instruction des officiers de compléments du service d'état-major de novembre 1913.
Le personnel ayant la charge de cette mission est sous la double hiérarchie des ministères des Finances et de la Guerre, celui des PTT n intervenant à la marge que pour des aspects techniques. Ce personnel bigarré se répartit en deux groupes. D'abord, un corps technique, fourni soit par les ministères des Finances, de la Guerre mais aussi des PTT. Ils sont supérieurs ou subalternes, agents ou sous agents dans les organes centraux basés à Paris. Initialement replié à Bordeaux face à l'avancée ennemie, le bureau central de la Poste militaire (BCPM) est rapatrié en octobre 1914 à l'hôtel des Postes de la rue du Louvre. Il s'y installe sur deux étages, puis dédoublé en novembre avec Paris-Conservatoire, le premier se chargeant des lettres et cartes-postales et le second des recommandés et paquets, en lien direct avec les gares du Nord et de l'Est. Créé en octobre, son jumeau qu'est le bureau central des colis postaux militaires (BCCPM), connecté pour sa part directement aux compagnies de chemins de fer, est installé en gare de Reuilly : il ne s'occupe que des colis postaux. Près de 2 000 personnes, dont 1 000 femmes auxiliaires des Postes civiles affectées au tri, œuvrent sur ces sites.
S'ajoute ensuite le personnel militaire du service Trésorerie et Postes, sur le théâtre des opérations, fournissant aussi ce qu'on appelle les estafettes et les vaguemestres, le plus souvent de petits sous-officiers, caporaux et sergents. À pied, à cheval ou à bicyclette, ils s'occupent du courrier expédiés et reçus par les soldats, au plus près des secondes lignes, exceptionnellement en première, et des cantonnements éloignés. Ils font aussi le service du quartier général pour la correspondance de l'Etat-major. À raison d'au moins un agent par régiment, celui-ci pouvant être secondé par un auxiliaire militaire, ils sont au moins 1 500 au début du conflit. Fin 1917, 1 989 hommes sont à l’œuvre sur les fronts nord-est et d'Europe centrale, des payeurs généraux aux sous-agents. Ils se répartissent entre 70 %de fonctionnaires des Finances et de la Guerre, et seulement 30 %des Postes. Par rapport à la situation de l'été 1914 dénoncée par les parlementaires et l'opinion publique, que le journal Le Temps du 7 novembre reprend ainsi «Il semble bien que le service du Trésor et des Postes, où les spécialistes des PTT ne sont qu'une faible minorité par rapport aux agents de l'administration des Finances, se montre aussi peu apte que possible à assurer la besogne postale dont il est chargé. [...] », cette situation décrite à la fin de 1917 s'était donc largement améliorée.
Si la Poste aux armées porte en son sein les germes de la désorganisation en matière d'acheminement, sa réactivation en août 1914 impose également des mesures stables régissant la circulation des correspondances, dont la principale a trait aux conditions tarifaires du courrier dit « militaire ».
Dès le 3 août, par le décret n'4735, la France prescrit le premier des assouplissements liés au tarif des correspondances. Celles échangées entre les soldats et leurs familles se verront bénéficier de la franchise postale, c'est-à-dire de l'exemption d'affranchissement. Afin de faciliter le temps de l'écrit pour les soldats, des cartes postales pré-imprimées, non illustrées portant mention de message brefs et informatifs comme « suis en bonne santé », « écrirai bientôt », « reçu votre lettre », sont massivement distribuées dans les cantonnements. Cette correspondance rapide et simple, devant traiter de l'essentiel, porte en germe matériel les origines du texto, banalisé un siècle plus tard. Mais cette pratique n'eut le succès escompté et ces cartes disparurent vite : les poilus avaient besoin d'écrire, beaucoup, de mettre des mots sur le trauma. L'idée est reprise en avril 1918 avec des cartes « priorité » de couleur bleu pâle, avec des mentions préinscrites sur lesquelles est interdite toute mention manuscrite. Mais elles sont vite détournées de leur usage sous l'aval du haut commandement qui laisse finalement faire au profit du maintien du moral.
Le 14 août 1914, une décision ministérielle permet la création et la vente de cartes postales par les éditeurs privés ; elle est complétée par le décret du 19 août autorisant la fabrication par l'imprimerie nationale et la vente par l'administration des Postes. Celles-ci sont destinées à la correspondance en provenance ou à destination des militaires et marins. Deux modèles sont disponibles, le modèle A pour la correspondance expédiée, et le B pour celle reçue. Ces cartes portent à l'angle droit supérieur, un faisceau colorié de drapeaux alliés. Au début, le premier modèle, A, est livré sur le front à raison de 450 000 exemplaires par jour, répartis entre les vaguemestres, au prorata des hommes sous leur juridiction. Le tiers à peine a réellement servi à l'écriture, le gaspillage atteignant le reste malgré des instructions sévères. Manifestement, les soldats réellement servi à l'écriture, le gaspillage atteignant le reste malgré des instructions sévères. Manifestement, les soldats n'aimaient pas correspondre avec leur famille par carte ouverte. Il n'en usait que pour les échanges banals, pour faire patienter, en attendant la possibilité plus intime décrire une lettre envoyée sous enveloppe. Le second modèle, le B, était vendu à l'arrière, au public, par les bureaux de poste, les recettes et les bureaux de tabacs au prix de 25 centimes le paquet de 10, puis 15 centimes à partir de décembre 1915. Au global, toutes ces cartes ne connurent pas le même succès que celui des cartes postales illustrées, qui firent la fortune des grands éditeurs.
Lettres et cartes constituent une large partie de ce qui est appelé « objets de la correspondance » concernés par les mesures tarifaires. Mais pas la seule, puisque l'Etat réglemente également le tarif des contenants et volumes, et en premier lieu ceux du paquet-poste, à différencier du colis postal'. Ces objets ne sont pas mentionnés dans le décret d'aout 1914ouvrant la franchise. Parce que la guerre durant plus que prévue, que l'éloignement des familles devant plus pesant, l'Etat comprend que la circulation d'autres choses que les mots devient nécessaire. Les besoins des soldats en campagne ont mis en vogue une autre catégorie de correspondance, que la clientèle a désignée sous l'expression « paquet du poilu ». Dans ce paquet, le combattant pouvait recevoir, avec autant de rapidité et de sureté qu'une lettre, des vêtements, des vivres, du tabac, etc... toutes choses qui prolongeaient la douceur des attentions familiales jusqu'aux tranchées. Le « paquet du poilu » a donc rendu de précieuses attentions, ce qui explique son expansion massive.
L'éloignement des organes postaux à renseigner et la lenteur des trains allongeant les temps d'échange d'une l'information trop rapidement dépassée du jour au lendemain, ont parasité tout le processus d'acheminement L'absence d'instruction efficace faite aux vaguemestres et leur mauvaise formation, ont initialement impliqué trop d'erreurs ou négligences. Surtout, à chaque bout de la chaine, le nombre de soldats et d'épouses, de fiancées ou de sœurs en capacité de correspondre se trouve sans commune mesure avec celui de la fin du Second Empire !
Du coup, les premières semaines du conflit mènent le système à l'apoplexie générale. Celle-ci se mesure au nombre immense de réclamations d'officiers aux ministères de la Guerre, voire même des Postes et Télécommunications, au sujet de correspondances qui n'arrivent pas, dont ce télégramme envoyé par le commandant du dépôt du 9e régiment d'Artillerie de Castres :
« Nombreuse correspondance du 102e Territorial m'est signalée en souffrance à Toulon et au dépôt à Saint-Etienne. N'ai pas eu connaissance que le 102e Territorial ait quitté Toulon vous prie de bien vouloir me fixer à cet égard ainsi que sur formation sur laquelle diriger correspondance et éventuellement renforts destinés à la 102e Territoriale ». Les états-majors eux-mêmes ne sont parfois plus desservis pendant des jours, tout aussi irrégulièrement que leur troupe. Pour mesurer la paralysie, le général Lachouque est chargé d'une tournée d'inspection des services de la Poste aux Armées du 19 au 25 septembre 1914. Ses observations dressent le tableau d'un service parfaitement inadapté au nombre de soldats et aux spécificités de la guerre moderne.
Un rapport d’inspection fait ainsi état de deux mille sacs de courriers demeurant en souffrance le 22 septembre 1914 en gare de Tours, situation qui on s’en doute n’est pas sans affecter gravement les combattants et leur familles. Un mobilisé affirme ainsi que « le retard dans les lettres adressées au front cause plus de ravages qu’une rafale d’obus ».
Après avoir décrit les 2 000 sacs de correspondances en souffrance en gare de Tours, Lachouque souligne combien certains fonctionnaires sont inefficaces en ce qui concerne le tri, et regrette la faiblesse généralisée des effectifs. Il aurait aussi pu regretter les moyens techniques dérisoires qui sont à disposition dans les unités. Par régiment, deux tilburys à cheval voire deux fourgons à correspondance qui sont envoyés pour retirer les dépêches aux gares de ravitaillement ou au point de contact indiqué avec le service postal des étapes.
Il faudra l'audace et le brio d'un civil Augustin Alphonse Marty, inspecteur général des Postes, pour sauver la Poste aux armées aux abois. En octobre 1922, Augustin Marty adresse un rapport sur la situation postale à son ministre de tutelle, Etienne Clémentel, et cloue au pilori le versant militaire. En novembre, il est nommé auprès de Joffre au grand quartier général. Le 22 du mois, le général en chef livre les nouvelles instructions concernant le service postal militaire sur les recommandations de son tout frais inspecteur général.
Le manque de moyens techniques affectés à la Poste aux armées ne dissimule pas totalement l'autre grand problème, à savoir l'inadaptation du processus d'acheminement des lettres.
Or l'organisation archaïque de la poste aux armées, datant pour partie de la guerre de 1870, se révèle incapable de faire face à une telle surcharge de courrier.
Très tôt, le commandement réalise le rôle crucial qu’a le courrier dans la conduite de la Grande Guerre. Lettres et cartes postales sont en effet, comme le rappelle la belle expression de Pierre Miquel,
« l’oxygène du poilu » et contribuent pour beaucoup au moral des troupes. Or, dans les premières semaines du conflit, le courrier est délivré aux combattants avec un retard constant d’au moins une dizaine de jours, parfois même d’un mois, quand les plis arrivent à destination…
Réformer la poste
Ces retards s’expliquent entre autres par la masse d’envois à traiter, qui avait été largement sous-estimée par les autorités. A la veille du conflit, on estime en effet à un million le nombre de lettres échangées chaque jour en France, chiffre qui quadruple entre août 1914 et novembre 1918. Or l’organisation archaïque de la poste aux armées, datant pour partie de la guerre de 1870, se révèle incapable de faire face à une telle surcharge de courrier. Une grande réforme est donc entreprise dès la fin de l’année 1914 mais suivant certaines dispositions imposées par le commandement qui, curieusement, ne visent pas forcément à une efficacité optimale. En effet, un acheminement trop efficace, et surtout sans contrôle, du courrier conduirait à la propagation rapide d’informations à caractère sensible qui ne feraient que faciliter la tâche des espions ennemis. Le 15 décembre 1914, les Secteurs Postaux seront créés officiellement par décret; 154 bureaux de Payeur deviendront 154 S.P.
La suite des numéros sera créée au fur et à mesure, tout au long de la Guerre, jusqu'au No 241. Ces Secteurs Postaux ne sont pas des lieux, mais représentant des Corps de troupes en mouvement, le plus souvent des Divisions.
La poste aux armées a donc, entre 1914 et 1918, la double mission de transmettre le courrier entre l’arrière et le front tout en alimentant les rapports de commission de contrôle postal destiner à informer le commandement du moral des troupes.
La réforme mise en place se révèle rapidement efficace puisqu’elle contribue à une diminution certaine des délais d’acheminement. En théorie, les lettres en provenance de région parisienne parviennent le lendemain ou le surlendemain au front, celles qui viennent des régions éloignées du sud de la France mettent 2 jours voire 3 pour les régions rurales les plus isolées. En pratique, il peut y avoir bien entendu quelques retards, essentiellement imputables aux prélèvements effectués par le contrôle postal, au ralentissement volontaire de l’acheminement imposés par l’imminence d’une attaque ou encore au bombardement d’un centre de tri, amenant ainsi la perte pure et simple du courrier. Certaines correspondances, où chaque lettre est scrupuleusement numérotée et datée, tant par le destinataire que par l’auteur du courrier, permettent ainsi aux historiens d’attester ce bon fonctionnement de la poste aux armées.
Pour autant, encore faut-il préciser que ce constat ne s’applique qu’aux combattants de Verdun, de la Somme ou de la Champagne puisque les poilus d’Orient envoyés aux Dardanelles ne bénéficient pas, malheureusement pour eux, des mêmes liaisons postales, le délai d’acheminement du courrier étant la plupart du temps de plusieurs semaines. Les combattants ne sont d’ailleurs pas sans ignorer cette réalité et en informent leurs correspondants, de manière à éviter toute inquiétude superflue à l’instar de ce marin du torpilleur Mortier qui écrit le 3 mai 1915 à sa cousine :
« Nous sommes depuis ce matin arrivés aux Dardanelles et depuis les temps que je désirais y venir tu m’en vois tout heureux. […] Ne t’étonnes pas si tu ne reçois pas très régulièrement les quelques mots que je t’envoie car ici le service postal ne marche pas très bien ».
C'est à partir de la seconde moitié de 1915 que se nouent les grandes décisions concernant les tarifs. Une première loi du 22 juin, retouchée le 27 avril 1916, accorde aux familles nombreuses et bénéficiaires des allocations militaires, l'envoi mensuel d'un colis recommandé, jusqu'à 1 kg, vers le front. Une seconde loi du 15 décembre concède la gratuité du port pour un colis jusqu'à 1 kg pendant la période de fin d'année incluant et Noël 1915 et le jour de l'An 1916 à tous les militaires. Elle fut renouvelée en 1916, 1917, 1918. Enfin, autorisation est donnée aux soldats, deux fois par an, d'expédier gratuitement un paquet de linge sale à leur famille en juin et septembre.
Ces mesures phares concernant l'époque de Noël, les familles nombreuses, et le quotidien des soldats, ont eu des conséquences logistiques inimaginables... sur la Poste civile ! Les tarifs décrétés dans le cadre de la Poste aux armées, déterminants surtout pour le paquet-poste, noyèrent celle-ci sous le poids des flux : 300 à 500 000 paquets par jour passant par le BCM à Paris-Poissonnière à partir de 1916, transitent forcément, en amont ou en aval, par les canaux de la Poste civile...
Si les tarifs des objets de correspondance « montant » et « descendant » sont libérés pour faciliter les échanges entre les soldats et leur famille, cet ensemble est néanmoins contrebalancé par le souci du secret, mis au fronton de la Poste aux armées : « Les emplacements et les mouvements des troupes doivent être tenus secrets ». Le déploiement de mesures de plusieurs ordres, à travers la censure engagée le 4 août 1914, doit permettre de conforter ce but.
Une censure qu'on peut d'abord qualifier de passive, par la pratique du dit « retard systématique ». Celui-ci se traduit par le stationnement en gare de ravitaillement, durant deux à cinq jours, des dépêches devant partir du front vers l'arrière. L'objectif est de désamorcé, par le temps passant, tout impact nocif d'une information stratégique qui pourrait filtrer. Plus tard, Marty fera abaisser au minimum ce délai très mal accepté par les familles à l'arrière.
Ensuite, un second niveau plus actif et répressif se déploie dans ce qu'on appelle «
le contrôle postal ». Sa mission initiale est présentée par Joffre dans une note du 4 janvier 1915 qui
« sert à vérifier le respect de l'interdiction faite aux militaires de nommer dans leurs lettres la localité où ils se trouvent ». Premier filtre, l'obligation faite aux soldats de remettre leurs lettres, ouvertes, non cachetées, aux vaguemestres. Elle fut maintenue jusqu'à l'été 1915, puis supprimée face à l'hostilité de la troupe.
Le conflit s'engluant, les esprits devenant plus revêches, l'insubordination et le défaitisme gagnants, le contrôle postal voit ses moyens et son périmètre de censure élargis. Dans les gares de ravitaillement, des sacs de dépêches tirés aléatoirement ou sur désignation de tel ou tel régiment par le commandement militaire, et sont passés au crible par les postiers-militaires affectés dans les commissions de contrôle installées dans les juridictions des bureaux de payeur. Chaque « lecteur » -et non pas « censeur » comme insiste l'autorité militaire- est soumis à des cadences journalières de 250 lettres à traiter : il s'agit de lire, parcourir, si besoin « caviarder », c'est-à-dire raturer ou découper le passage ou les mots gênants, voire détruire la lettre en fonction du degré de gravité et d'importance des passages coupables. Il faut enfin prévenir la hiérarchie si ce qu'on y lit doit être dénoncé.
Malgré les moyens déployés, ainsi que la diffusion d'une information théorique et contraignante auprès des soldats et familles, on estime que 2 à 4 % des 2,4 milliards d'objets de correspondances échangés annuellement entre le front et l'arrière ont réellement subi une censure active Face à la sécheresse des chiffres se dressent aussi la perception des soldats. Ceux-ci, comme leur famille, sont informés des pratiques de contrôles, des risques encourus. Mais beaucoup ne se résolvent pas à cette violation comme l'écrit le soldat Victor Rey, du 24° RA, 11 mai 1917 à ses parents : «
Je suis furieux que vous ne receviez pas mes lettres. Il y a là un abus et une sottise qui me font hurler. C'est à la fois de la peur et de l'inquisition ; ça sent le bourgeois et le curé. Certes, ce qui vient d'être fait est intéressant, mais il y a loin de ce résultat à celui qu'on a eu le si grand tort de nous donner à espérer, et le coût dépasse de beaucoup la valeur ». D'autres s'en accommodent en faisant contre mauvaise fortune bon cœur, comme le soldat Henri Bouvard, écrivant à son épouse le 3 décembre 1917 :
« La censure, tu le sais, est impitoyable ici et certains pauvres poilus ont appris à leurs dépens qu'ils ne devaient pas avoir la langue trop longue, ni même recevoir des lettres (qui sont d'ailleurs supprimées) sur lesquelles les parents ont souvent aussi la langue
un peu longue. C'est révoltant mais c'est ainsi. Il semblerait qu'une lettre est une chose sacrée, il n'en est rien ! Sois donc prudente, ma chérie, et si tu veux que je reçoive toutes tes lettres, ne me parle pas de la guerre. Contente-toi de me parler de notre grand amour » (...)
Au bilan, quoi qu'ait pu être l'épaisseur du voile terne jeté par la censure sur la Poste aux armées, restera la capacité de celle-ci, après avoir digéré une réforme aussi rapide qu'efficace de son fonctionnement, à accompagner les armées jusqu'au bout du conflit, passant de la position de caillou dans la chaussure à celle d'atout technique et moral.
Comment ca marche ?Lorsqu’un poilu, écrit une lettre ou une carte postale à sa famille, il ne peut la poster directement de sa tranchée. Il doit donc la confier à un soldat spécialement affecté à la collecte et à la distribution du courrier : le vaguemestre. Celui-ci apporte sa précieuse collecte à un bureau payeur militaire situé en zone des armées. Là, le courrier y est affranchi, les poilus n’ayant pas à payer pour leur correspondance (c’est la franchise militaire). Lettres et cartes postales sont ensuite transportées par train militaire hors de la zone des armées jusqu’à un bureau de poste civil qui transmet alors le courrier directement à son destinataire.
En chemin, inverse, de l’arrière au front, l’acheminement du courrier s’effectue au moyen d’une longue chaine constituée d’au moins une douzaine d’intermédiaires. Les correspondances doivent en effet être envoyées sans adresse afin de tenir secret les mouvements et emplacements des troupes. Mais cette injonction bien compréhensible du point de vue de la sécurité militaire et de la lutte contre « l’espionnite » place du même coup l’administration des postes dans l’impossibilité de remplir sa mission, étant incapable de délivrer un courrier sans mention de la localité du destinataire. C’est pourquoi, dans chaque bureau de poste et mairie sont disposées des affiches permettant aux expéditeurs de connaître avec précision les indications à faire figurer sur le courrier à envoyer, le front étant en effet divisé en différents « secteurs postaux ». Ainsi, plus de 4 millions de lettres et cartes postales, 320 000 colis et 11 000 mandats sont quotidiennement triées par le Bureau central militaire de Paris. Le courrier est par la suite acheminé par train postal jusqu’au secteur de destination puis confié au vaguemestre qui, même lors d’un bombardement, remonte les lignes et se faufile à travers les boyaux pour distribuer les précieuses missives.
Un poilu essentiel : le vaguemestreDans ces conditions, on ne s’étonnera pas de constater qu’au sein de cette microsociété que forment les tranchées, le vaguemestre soit un personnage primordial, à l’instar du cuisinier. Leur mission est, de surcroît, en plus d’être de première importance, très dangereuse puisqu’il doit progresser le long du front pour distribuer et/ou relever le courrier. Beaucoup le payent d’ailleurs de leur vie. Le vaguemestre est en effet le dernier maillon de la très longue chaîne d’acheminement du courrier et a un rôle ingrat. Sa « tournée » est aléatoire, périlleuse, difficile et est bien souvent la cause de retards voire de pertes du courrier (en cas d’attaque par exemple)..
Personnage essentiel pour les poilus, le vaguemestre n’en est pas pour autant automatiquement populaire suivant qu’il distribue ou non les lettres, cartes postales et colis tant attendus. Cristallisant et amplifiant bien involontairement le silence des proches, il peut ainsi être l’objet d’une véritable détestation de la part des combattants privés de nouvelles. De plus, le vaguemestre est le plus souvent un sergent, voire un adjudant, qui est placé sous la responsabilité de l’officier payeur du régiment. Ceci lui vaut parfois d’être taxé d’embusqué puisque son bureau est situé en arrière des tranchées de première ligne.
Mais, apportant les nouvelles, a fortiori bonnes, le vaguemestre donne le « la » de toute la journée. C’est d’ailleurs ce que rappelle en juillet 1915 le Canard poilu, un journal de tranchée autoproclamé « hebdomadaire, torsif et antiboche », dans une série de portraits des « types de front ». Figure essentielle du microcosme combattant, le vaguemestre est décrit comme étant « le clocher, le champ, le foyer », en bref un individu qui cristallise sur sa personne « tous les souvenirs et tous les espoirs ».
Incarnation de la poste aux armées, le vaguemestre est donc un personnage central de la (sur)vie des tranchées, indispensable lien vers l’arrière par l’intermédiaire du courrier. Toutefois, il convient de mentionner qu’un certain nombre de lettres et cartes postales de poilus ne transitent pas par ses services. En effet, en parallèle de la poste aux armées, se développe un véritable réseau non officiel d’acheminement de la correspondance qui n’est d’ailleurs pas nécessairement plus rapide. A la faveur d’une permission ou d’un contact avec une personne ayant accès à l’arrière, les courriers sont postés directement d’une boite aux lettres civile, et échappent ainsi complètement à la poste aux armées.
- Deuxième guerre mondialeLa poste aux armées en 1939 avait été façonnée par l'organisation mise en place durant la Grande Guerre, puis par les réformes successives de l'entre-deux-guerres :
• 1914: mise en place des secteurs postaux (numéros identifiant un bureau postal militaire desservant des unités).
• 1924: application de la loi de séparation entre les fonctions postales et les fonctions de trésorerie de la poste aux armées (loi de 1921). Cette réforme crée la poste aux armées telle qu'elle sera en 1939.
• 1940: introduction du secteur postal à 5 chiffres. C'est la dernière grande réforme avant l'Armistice de juin 1940.
Dès la mobilisation, l'organisation de la poste aux armées en temps de guerre est activée. Elle est structurée autour des éléments principaux suivants :
• Bureaux centraux militaires, en charge de collecter et de trier le courrier à destination et en provenance des armées. Ils sont composés de civils de l'administration des postes détachés auprès de la poste militaire. Ils sont l'articulation entre les bureaux-frontière (pour les secteurs postaux du front), les secteurs postaux en garnison et la poste civile.
Les BCM sont au nombre de cinq :
• Bureau central militaire °1 de Melun
• Bureau central militaire n°2 de Moulins
• Bureau central militaire n°2bis de Moulins.
• Bureau central militaire n°3 de Marseille.
• Bureau central militaire A de Tunis
Les Bureaux Centraux Militaires sont de véritables usines à trier le courrier. Un reportage paru dans Le Petit Parisien du 19 novembre 1939 décrit l'activité d'un BCM qui n'est pas localisé mais qui est de toute évidence celui de Melun. Celui-ci emploie 900 personnes (dont 150 à 200 postiers détachés par l'administration postale) et traite quotidiennement 4 millions de lettres, 120 000 colis et 50 000 imprimés.
Ce type de reportage servait à tenter d'expliquer l'ampleur du travail de la poste aux armées afin de justifier à l'opinion publique exaspérée les délais d'acheminement du courrier à destination ou en provenance des soldats durant les premiers mois de guerre (jusqu'à plus de trois semaines). La raison était essentiellement que la mobilisation générale avait privé les services postaux de personnel qualifié et désorganisé leur fonctionnement.
• Secteurs postaux, bureaux postaux militaires collectant et distribuant le courrier des soldats des unités qui en dépendent. Ce service est assuré par des militaires (vaguemestres, officiers en charge du courrier). Certains sont fixés géographiquement et desservent des unités en garnison, d'autres sont mobiles et desservent des unités en campagne (front).
Les secteurs postaux étaient répartis comme suit:
• Secteurs postaux de 1 à 265: attribués aux différentes unités de France métropolitaine.
• Secteurs postaux de 301 à 390: secteurs postaux dits de catégories attribués aux unités de réserve (301 à 331) et aux prisonniers de guerre (340 à 370). Le secteur postal 390 devait quant à lui pour des questions de confidentialité être le seul communiqué à tout correspondant à l'étranger, en lieu et place du secteur postal réél du militaire. Les correspondances à destination des militaires et provenant de l'étranger devaient donc en principe être adressées uniquement au secteur postal 390.
• Secteur postaux de 400 à 555: troupes d'Afrique française du Nord (AFN).
• Secteurs postaux 603 à 619: troupes du Levant.
• Secteurs postaux 700 à 704: troupes de Corse, troupes d'Outre-mer.
• Secteurs postaux 800 à 998: forces aériennes.
• Secteurs postaux 2001 à 2252: ces secteurs postaux, dits secteurs postaux fictifs, correspondent à des bureaux postaux civils s'étant vu confier une mission de poste militaire.
Les secteurs postaux (hormis les secteurs des séries 300, 800 et 900 qui n'avaient pas de cachet) disposaient de deux types de timbres à date :
• Les cachets muets, sans indication du secteur postal, destinés aux plis ordinaires des soldats.
- Plusieurs variantes de cachets muets avec le mot poste au singulier : avec ou sans étoile en bas du cachet, avec ou sans indication de levée. Les cachets muets avec poste au singulier étaient répandus dans tous les secteurs postaux. Les cachets muets frappés avec une encre bleutée sont caractéristiques de l'utilisation par des secteurs postaux du Maroc.
- Deux types de cachets avec le mot postes au pluriel, l'un ayant une étoile caractéristique en bas du cachet et l'autre ayant deux étoiles de part et d'autre des mots postes aux armées. Ces deux types de cachets ont été utilisés en Afrique française du Nord.
• Les cachets avec indication du secteur postal, utilisés pour les lettres de service ainsi que pour les lettres recommandées des soldats.
•
Bureaux-frontières, centres de tri des armées assurant le transit du courrier entre les bureaux centraux militaires (arrière) et les secteurs postaux en campagne. Leur dénomination fait référence à la frontière militaire séparant la zone de l'arrière de la zone du front. Il y avait un bureau-frontière par armée et les bureaux-frontière se trouvaient le plus souvent au sein d'une gare régulatrice (gare de triage régulant le trafic ferroviaire militaire entre l'arrière et le front).
Ils sont au nombre de huit, leur localisation semble assez incertaine et avoir varié au cours de la période des hostilités. Étant à la jonction de la zone de l'avant (zone des armées) et de l'arrière, ils sont souvent logiquement situés au sein des gares régulatrices :
• Bureau-frontière F (non localisé)
• Bureau-frontière G (non localisé)
• Bureau-frontière H (gare régulatrice n°3 de Saint-Dizier)
• Bureau-frontière J (gare régulatrice n°4 de Vesoul)
• Bureau-frontière K (gare régulatrice n°5 de Troyes)
• Bureau-frontière M (gare régulatrice n°7 de Creil)
• Bureau-frontière Q (non localisé)
• Bureau-frontière U (Ajaccio)
Les bureaux-frontières comme les bureaux centraux militaires pouvaient oblitérer du courrier qui leur était directement confié.
La poste aux armées est sous la direction d'un directeur central de la poste aux armées rattaché au ministère de la Guerre (4e Bureau).
Toutefois la mise en place de cette organisation ne s'est pas faite sans mal : aux premiers jours, le personnel nécessaire n'était pas encore en place et la poste aux armées n'a pu assurer correctement le traitement de l'immense masse de courrier adressée aux mobilisés. Les difficultés ont été accrues par le fait que la mobilisation avait également amputé le système postal civil d'une grande partie de son personnel et donc que le traitement du courrier dans l'ensemble s'en trouvait perturbé.
Peu avant l'armistice et la disparition des secteurs postaux, une réforme avait été entreprise en mai 1940, visant à mettre en place un système de secteurs postaux à 5 chiffres constituant une adresse postale pour chaque unité.
La réforme des secteurs postaux en 1940 et la disparition des secteurs postaux
La réforme mise en place en mai 1940 avait pour but de mettre en place un système de secteurs postaux à 5 chiffres.
L'organisation décrite ci-dessus (secteurs postaux de 1 à 3 chiffres, BCM, bureaux-frontière) demeurait, mais en plus chaque unité se voyait attribuer un numéro de secteur postal à 5 chiffres constituant en lui-même une adresse postale. Cette adresse postale à 5 chiffres était rattachée à un secteur postal à 3 chiffres (la relation entre le secteur postal à 5 chiffres pouvant varier avec le mouvement des unités)
Les cachets "poste aux armées" n'ont donc pas été modifiés dans le cadre de cette réforme : cachet sans indication de secteur postal, cachet avec secteur postal à 3 chiffres sur les lettres recommandées.
La correspondance entre secteurs postaux à 5 chiffres et unités militaires n'est pas connue.
Du fait de l'offensive allemande de mai-juin 1940, ce système n'a guère eu le temps d'être mis en place avant la réduction drastique des effectifs de l'armée française aux conditions de l'armistice et la disparition des secteurs postaux.
Les secteurs postaux sont supprimés en juillet 1940 après l'armistice. Les troupes d'Afrique du Nord et du Levant ont cependant continué à utiliser leurs numéros de secteurs postaux à 3 chiffres (séries 400, 500 et 600).
Toutefois le principe du secteur postal à 5 chiffres sera repris et appliqué par l'armée de Libération.
- Après la Seconde Guerre mondiale Durant les différents conflits qui se succèdent (Madagascar, Corée, Indochine, Egypte, Chypre et Algérie, etc.), la Poste aux Armées s'établit à chaque fois sur le sol étranger.
En 1947, les fonctionnaires de l'administration des postes et des télécommunications sont placés en position de détachés. Ils signent un engagement de deux ans en temps de paix et d'un an en temps de guerre. Ils sont rémunérés par le Ministère de la Guerre.
En 1948, une Section Centrale de la Poste aux Armées est créée et relève de l'Etat-Major des Armées - 4ème Bureau. Elle est dirigée par un Haut Fonctionnaire des P.T.T. assimilé appelé "Chef du Service de la Poste aux Armées". Il a la charge de :
- l'organisation générale de la Poste aux Armées,
- l'élaboration des différents textes concernant le fonctionnement,
- l'administration du personnel,
- du contrôle de la comptabilité des bureaux postaux militaires, - de la surveillance des chefs de la poste aux armées hors métropole.
En 1953, de nouveau le Service de la Poste aux Armées est réorganisé. Un corps spécial est créé. Le personnel est recruté dans l'Administration des Postes, Télégraphes et Téléphones. De nouveaux grades d'assimilation apparaissent :
Ces grades donnent les mêmes droits conférés aux militaires de même rang dans l'armée et ont les mêmes devoirs. Toutefois, le statut de personnel détaché reste effectif.
Pour le matériel, rien ne change. Le matériel technique (registres, imprimés, sacs postaux, etc...) est toujours fourni par l'Administration des Postes, Télégraphes et Téléphones et le reste par le Secrétariat d'Etat à la Guerre.
Le service en lui-même est remanié. Les organes de direction sont :
A l'échelon commandement en chef : - une direction centrale de la poste aux armées,
- des bureaux centraux militaires,
- des bureaux postaux militaires,
- des bureaux-frontières,
- des bureaux postaux desservant les unités non comprises dans les armées.
Sur les théâtres d'opérations : - une direction de la poste aux armées des T.O.E.,
- des bureaux postaux militaires.
A l'Armée : - une direction de la poste à l'armée,
- des bureaux postaux militaires
Les organes d'exécution sont :
- les bureaux centraux militaires (B.C.M.) : tri et acheminement de la correspondance et des colis postaux,
- les bureaux-frontières : intermédiaires entre B.C.M. et les armées,
- les bureaux postaux militaires : distribution et expédition de la correspondance et des colis des corps de troupe et services,
- une réserve de personnel technique.
En 1958, des agences postales militaires "terre, marine et air" peuvent être créées dans des camps ou bases estimés importants que ce soit en France ou dans les départements d'Outre-mer.
En 1959, le personnel féminin de l'Administration des P.T.T. peut être détaché au même titre que le personnel masculin.
En 1958, des agences postales militaires "terre, marine et air" peuvent être créées dans des camps ou bases estimés importants que ce soit en France ou dans les départements d'Outre-mer.
En 1972, les secteurs postaux existent toujours mais on leur joint des codes postaux militaires. Chaque bureau postal militaire détient un code postal (exemple : B.P.M. 102 de Lille : 59998 LILLE ARMEES).
Une nouvelle réforme intervient au début des années 1990. Une série de codes spécifiques "00000 ARMEES" à "00899 ARMEES" sont affectés à une nouvelle entité (exemple : B.P.M. 121 - S.P. 69386 devient B.P.M. 121 - S.P. 69386 - 00527 ARMEES).
Le Service de la Poste aux Armées devient une entité militaire à part entière en 1973. Il fonctionne comme un service civil. Il est chargé en liaison avec les administrations postales civiles françaises et étrangères :
- du dépôt, de l'acheminement et de la distribution du courrier à destination ou en provenance des armées,
- des opérations postales, télégraphiques, financières et d'épargne autorisées en faveur des armées,
- des opérations de trésorerie dans les territoires ou garnisons dépourvus de payeurs aux armées,
- de la desserte postale des missions militaires à l'étranger.
Ce service est dirigé en temps de paix par un chef de service désigné par le ministre des armées en accord avec le ministre des postes et télécommunications.
Le service de la poste aux armées comprend :
- une direction centrale, placée sous l'autorité du chef d'état-major de l'armée de terre,
- un centre de tri postal Paris Tri Armées,
- un bureau central Paris Armées 01, bureau centralisateur et d'échange
- une compagnie administrative assure le paiement de la solde et des indemnités des personnels,
- des bureaux postaux militaires (B.P.M.) et des organismes rattachés. Les B.P.M. comprennent des bureaux principaux fonctionnant dans chaque région militaire, aérienne, maritime et dans toute garnison désignée par le Ministre des Armées ; des bureaux annexes rattachés aux principaux.
- des directions de service des territoires
- Au XXIème siècle Le Service de la Poste aux Armées en 2001 ne change pas. Il est toujours présent en France, dans les départements et territoires d'Outre-mer, en Allemagne, dans les pays étrangers liés par des accords internationaux et sur les théâtres d'opérations (ex-Yougoslavie, Kosovo, Afrique, etc.)
Mais après 350 ans de bons et loyaux services, le 22 mai 2015, a eu lieu au Fort Neuf de Vincennes la cérémonie de fin des activités de la Poste Interarmées, clôture effective le 30 juin suivant ; exit donc le service de la Poste aux armées comme tous les militaires de notre génération l'ont connu, c'est-à-dire des personnels de l'ex-ministère des Postes, Télécommunications et Télégraphe (PTT), ensuite du groupe de La Poste, détachés au ministère de la Défense sur la base de leur volontariat à servir « en tout temps et en tous lieux » au sein du service de la Poste aux armées, sur le sol national mais aussi en participant aux Opérations Extérieures (OPEX).
Ces personnels étaient assujettis au règlement de discipline général des armées, c'est-à-dire principalement à porter l'uniforme avec un grade d'assimilation en rapport avec le grade administratif détenu chez l'opérateur civil, bien évidemment à avoir une tenue irréprochable, ce à quoi chacun s'y employait avec bon cœur.
Qui aurait eu à connaître pareille situation. Ils avaient tous connu et servi en de nombreux services disséminés de par la France (chaque région militaire avait ses bureaux postaux militaires –BPM- et ses bureaux postaux navals –BPN-) et le Monde, époque où la Poste armées rayonnait encore le long du Rhin (FFA), sur la corne de l’Afrique (Djibouti), l’Afrique centrale (Gabon, Tchad et Centrafrique), l’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire) au Moyen Orient (Liban), l’Asie Centrale (Afghanistan, Tadjikistan et Ouzbékistan) et en Polynésie Française lors des campagnes des tirs atomiques. Les personnels de la Poste aux armées devenue interarmées ont principalement servis sous le drapeau français, mais aussi celui de l’ONU, de l’OTAN et de l’Europe comme ce fut le cas au Nord Est du Tchad lors de la crise avec le Sud-Soudan.
Ils ont été de toutes les opérations extérieures depuis 1962 sur le continent africain, dans les Balkans, au Moyen-Orient, en Asie et au Levant. Les trois sous-officiers blessés au Liban ces dernières années témoignent de leur engagement.
Ils ont toujours été le trait d’union entre les militaires en mission et leurs familles qui leur sont profondément reconnaissantes de la qualité et la permanence de lien.
Ils ont joué un rôle essentiel dans la préservation de la capacité opérationnelle de nos forces. Ils ont partagé les risques de leurs frères d’armes, dont ils ont aussi partagé les valeurs : la fraternité, la volonté, l’abnégation mais aussi l’excellence.
C’est sur la place d’armes du Fort Neuf de Vincennes que s’est déroulé cette cérémonie de la mise en sommeil du service de la Poste aux armées qui s’est traduite par le roulage du fanion. Ce fanion qui fut ensuite remis au Service Historique de la Défense (SHD) de Vincennes, au département de la symbolique afin d’être exposé dans une vitrine .
Face aux exigences, principalement budgétaires et les rigueurs de l’obligation de passage par le code des marchés publiques, la Défense a lancé un appel d’offre afin de remplacer la Poste interarmées uniquement dans la partie « courrier » à l’international, c’est-à-dire la desserte postale des militaires français en opérations extérieures, sur une base militaire hors du territoire national et la desserte des bâtiments de la Marine nationale.
Depuis 2012, une nouvelle structure dénommée : « Service postal à l’international pour la Défense – SPID » a été créée. Il s’agit d’une association de La Poste avec la Sodexo qui a donc emporté ce marché et ce pour une durée de quatre ans. Le premier bureau SPID a ouvert en octobre 2013 aux Emirats arabes unis à Abu Dhabi.
Cette structure assure les transports « in et out » du courrier international à destination des militaires en opérations extérieures ainsi que la distribution des envois reçus par le biais d’agences postales implantées sur les théâtres d’opérations. Elles assurent la prise en charge des envois –lettres et colis- à destination de la France. Elles proposent la vente de produits préaffranchis (solutions d’affranchissement comme le disent maintenant les postiers « new look » customisés commerciaux, exit l’époque ancestrale où la notion d’usager prévalait sur tout autre considération mercantile de gammes tarifaires). D’ailleurs les postiers détachés de l’ancienne poste aux armées, dont nombreux avaient connu cette époque, et trop longtemps resté dans le giron de la Défense, gardaient encore dans leur façon de travailler cette notion essentielle de servir, service adapté aux besoins de la clientèle militaire et non des propositions de gammes de produits postaux ne représentant pas toujours un gage de rapidité et de sécurité même si la prestation devenait parfois plus onéreuse en changeant de prestataire. Quid donc du bureau postal militaire « en campagne » OPEX, format miniature du bureau de poste de métropole avec ses services financiers (caisse nationale d’épargne, mandats, chèques postaux...) et bien évidemment toutes les prestations postales ayant trait au courrier en général. Maintenant image d’Épinal, mais la Poste aux armées véhiculait cette rassurante impression de posséder dans le camp militaire un petit bout de son pays, point de convergence des nouvelles à recevoir de la famille et amis, mais aussi à envoyer.
Ainsi se clôt « Un chapitre important de l’histoire de nos armées alors que cessaient les activités du dernier bureau actif de la poste interarmées à Kaboul le 31 décembre 2014 ».