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« ... Le devoir de mémoire incombe à chacun...rendre inoubliable. Ceux qui sont morts pour que nous vivions ont des droits inaliénables. Laisser la mémoire se transformer en histoire est insuffisant. Le devoir de mémoire permet de devenir un témoin... »
Sujet: "Une infime lueur d'espoir" : Témoignage d'André Segond, prisonnier du camp 113 Lun 18 Nov 2024 - 10:37
Le lieutenant-colonel Lionel Séménadisse (à gauche) et André Segond.
Citation :
Nous apprenons la sortie du livre "Une infime lueur d’espoir" écrit par le lieutenant-colonel Lionel Séménadisse, délégué militaire départemental de la Nièvre, qui retrace la vie et les combats d’André Segond, captif dans le tristement célèbre camp 113 en Indochine où Georges Boudarel a sévi.
« J'ai eu une enfance difficile, car j'étais le souffre-douleur de mon beau-père, pourtant un héros de la guerre 14-18, mais qui est tombé dans l'alcool », déclare d'emblée André. « Je n'allais pas à l'école et, à 10 ans, on m'a placé dans les fermes. Alors, à 18 ans, j'ai décidé de partir pour faire une carrière militaire et je me suis engagé ». Suivront deux périodes en Indochine dans l'Infanterie coloniale, de 1949 à 1951 d'abord puis, après un court passage en Algérie, une seconde, d'août 1952 à décembre 1953.
André sera fait prisonnier au cours de cette dernière et, tenant tête au chef du camp et à son autorité, vivra un enfer dans le tristement célèbre camp 113. Les souvenirs sont intacts : En voyant un Français dans l'effectif des gardiens, j'ai pensé que mes conditions de détention seraient sans doute meilleures. La première discussion que je vais avoir avec Georges Boudarel va rapidement me faire perdre cette illusion ! Avant de rajouter : « Heureusement pour moi, j'ai appris à souffrir dans ma jeunesse et à me débrouiller seul pour survivre. Cela m'a grandement servi pendant ma captivité dans des conditions effroyables ». Effectivement, l'opposition sera féroce entre les deux hommes que tout oppose : leur milieu social, leur éducation et leur engagement. À sa libération, André pèse 37 kilos et sera hospitalisé pendant une année entière, souffrant de nombreuses affections.
Cette partie de sa vie, le vieux soldat n'en parlera à personne, pas même à son épouse ni à ses enfants, jusqu'à sa rencontre en 2023, lors d'une commémoration, avec le lieutenant-colonel Lionel Séménadisse. Ce dernier, touché par cette histoire, le convaincra de témoigner : « Cette histoire, hors du commun, mérite d'être retracée et inscrite dans la mémoire, avant d'être perdue. Ce témoignage est d'autant plus riche et rare qu'il émane d'un militaire du rang, et non pas d'un officier, comme c'est souvent le cas ». Au final, André lui en est reconnaissant, malgré ses premières réticences : « Au début, je ne voulais pas, mais je l'ai fait pour les jeunes. Et ma famille a découvert mon histoire par le livre ! ».
Effectivement, Lionel Séménadisse en a tiré un ouvrage qui, non content de relater la vie d'André Segond, donne un cours d'histoire contemporaine et livre une intéressante étude sur les mécanismes qui font parfois basculer les hommes. Prenant appui sur la personnalité de Georges Boudarel, ce sympathisant communiste français combattant au sein du Viet Minh et qualifié de « monstre créé de toutes pièces », l'auteur s'interroge : « Comment un homme issu d'un milieu favorisé, qui se destine à être prêtre, peut-il devenir un bourreau ? "
Pour la petite histoire, André Segond attendra 1985 et l'intervention de l'Anapi (Association nationale des anciens prisonniers internés déportés d'Indochine) pour recevoir la médaille militaire, puis la Légion d'honneur en 1988. Sa pension militaire d'invalidité définitive ne lui sera accordée qu'en 1995, ce qui ne l'aura pas empêché de travailler toute sa vie comme ouvrier agricole !
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