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Rien de ce qui est kaki, bleu marine ou bleu ciel ne nous sera étranger
Otages : ce qu'il s'est vraiment passé avec les gendarmes nigeriens
Pourquoi des gendarmes nigériens se sont-ils retrouvés pris sous le feu des commandos français, lors de la tentative de libération des deux otages Antoine de Léocour et Vincent Delory, le samedi 8 janvier ? Cette question a provoqué une certaine tension entre Paris et Niamey, aujourd'hui nettement apaisée. Dans un premier temps, les militaires français ont été surpris de cette présence, soupçonnant parfois ces gendarmes de complicité avec les terroristes d'AQMI, ce que les autorités nigériennes réfutaient absolument. Au terme d'une enquête sur cet épisode dramatique - qui fait l'objet d'un long article dans Marianne du samedi 29 janvier -, nous sommes dès aujourd'hui en mesure de raconter en détail ce qui est arrivé à ces gendarmes.
Dès l'enlèvement des deux Français, le vendredi 7 janvier à 23 heures, dans un restaurant de Niamey, les forces de sécurité nigériennes se lancent à la poursuite des ravisseurs. Les premiers engagés sont des membres de la Garde nationale, une force paramilitaire du ministère de l'Intérieur. Des gendarmes, déployés dans les zones rurales, sont appelés en renfort. Un premier accrochage a lieu vers une heure du matin, à 150 kilomètres au nord de Niamey. Un officier de la Garde nationale est blessé et les ravisseurs prennent la fuite. Seul un véhicule de gendarmes se lance à leur poursuite. Il s'agit de dix hommes de la brigade de Tillabéry, mal armés (pas de mitrailleuses de 12,7 mm sur leur 4x4, contrairement à la Garde nationale) et habillés d'un mélange d'uniformes réglementaires et d'effets civils.
Ces gendarmes, très bons connaisseurs de la région, suivent les ravisseurs jusqu'en territoire malien, où ils ont un droit de poursuite en vertu d' accords entre les deux pays voisins. Dans la matinée de samedi, ils tombent alors dans une embuscade tendue par AQMI. L'action se déroule dans une zone de végétation, au milieu d'arbustes. Leur pick-up est arrêté et le chauffeur, désarmé, est abattu alors qu'il descend du véhicule. Au cours des échanges de tirs, des gendarmes, dont l'officier qui les commande, sont blessés, dont l'un à la tête. Au moins l'un d'eux perd connaissance. Trois gendarmes sont faits prisonniers, alors que six de leurs camarades parviennent à s'enfuir au milieu de la végétation, sans combattre.
Sans qu'ils soient attachés, les trois gendarmes sont alors placés dans leur véhicule bleu marine et considérés à leur tour comme des otages. Ce 4x4 se joint aux deux autres, un blanc tôlé dans lequel se trouve les deux Français, entravés, et un beige. Le convoi repart et environ cinq kilomètres plus loin fait une halte dans une zone boisée.
C'est à ce moment là, vers 11 heures, que les trois hélicoptères du Commandement des opérations spéciales (COS) surgissent, arrivant de Ouagadougou avec deux groupes d'assaut du 1er RPIMa à bord. Personne n'est alors au courant de l'embuscade dans laquelle viennent de tomber, quelques dizaines de minutes plus tôt, les gendarmes nigériens qui n'ont pas pu prévenir leur hiérarchie. Les images prises depuis l'avion de patrouille Atlantique 2, qui suit les terroristes depuis le milieu de la nuit,, ne permettent pas de comprendre dans l'immédiat ce qu'il vient de se passer. A bord des hélicos français, personne ne sait que trois gendarmes nigériens sont désormais prisonniers d'AQMI.
Les premiers coups de feu tirés contre les hélicos, qui blessent un pilote à la jambe, proviennent du 4x4 bleu de la Gendarmerie. La réplique, à la mitrailleuse, est immédiate. Il est probable que les gendarmes prisonniers aient été touchés par les tirs français - qu'on peut donc qualifier de tirs fratricides - à ce moment-là. Au terme des combats qui durent plus de 40 minutes, les militaires du COS relèvent trois morts et trois blessés (en plus des deux otages Français abattus par les terroristes) parmi les hommes présents dans les véhicules ennemis. Malgré les soins, l'un des blessés va rapidement mourir.
Certains de ces six hommes (4 morts et 2 blessés) portent des pièces d'uniformes de gendarmes, constatent alors les militaires du COS, sans comprendre. En réalité, quatre d'entre eux sont des gendarmes faits prisonniers (2 morts et 2 blessés). A l'exception de deux tués, les terroristes (sans doute sept) sont parvenus à s'enfuir à pied dans la végétation.
Quelques zones d'ombre subsistent, car les forces spéciales expliquent avoir trouvé des papiers de gendarmes sur un homme qui a ouvert le feu contre eux. Mais il n'est pas exclu que les terroristes aient pu dérober des équipements (veste de treillis militaires) à leurs prisonniers.
Les deux gendarmes blessés sont rapatriés à Niamey, où l'un est toujours en soins intensifs, avec une grave blessure au ventre.
Au lendemain de cet épisode, Paris exprime des soupçons sur le rôle exact des gendarmes : complices ou victimes ? Il faudra plusieurs jours pour que les informations soient recoupées et que les images prises par l'Atlantique 2 à huit kilomètres de distance et 4000 mètres d'altitude (et qui, depuis lors, ont été remises à la Justice française) puissent livrer une version à peu près claire des faits.