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 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!

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Roger Bodson
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MessageSujet: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyVen 2 Jan 2009 - 8:33

Article qui a été publié dans le REMEMBER, revue de la Régionale de Verviers de l’Amicale Nationale Para-Commando Vriendenkring.

Roger Bodson


L’article suivant est paru dans le Fana de l’Aviation n°358 de septembre 1999.
Il est publié avec l’aimable autorisation des Editions Larivière.

1200 avions, 12.000 parachutistes pour libérer METZ… en 1919.

Par François PERNOT, professeur d’histoire contemporaine à l’Université d’Evry.

Le 16 mai 1926, un article du New York American défraya la chronique. Un aviateur américain, le Général William «Billy» Mitchell, dévoilait en effet les grandes lignes d'une vaste opération planifiée en octobre 1918 et devant inter­venir au cours du premier semestre 1919. « Voici le plan d'opération que j'ai élaboré en France pendantl'automne1918. On n'en a jamais parlé auparavant et même la Division qui devait être engagée n'en a presque rien su. Mais maintenant, certaines choses peuvent être dites. ». Cette mystérieuse opération était à la fois ambitieuse, révo­lutionnaire à sa manière et... quelque peu utopique pour l'époque. Il s'agissait ni plus ni moins que de parachuter 12 000 hommes de la 1ère Division d'Infanterie américaine sur Metz pour prendre cette ville-clé du dis­positif allemand et hâter ainsi la fin de la guerre!
Les Américains en Lorraine

En septembre-octobre 1918, du côté allié, la victoire semblait encore lointaine et les généraux comme les responsables poli­tiques pensaient que la guerre durerait au moins jusqu'à l'été 1919. Dans cette pers­pective, après les offensives alliées difficiles mais victorieuses de juillet et d'août 1918, on prépara dans les deux camps de nouvelles grandes opérations pour l'automne 1918.

En octobre 1918, dans l'Est de la France, le front se stabilisa devant Metz, de Sedan, au nord-ouest, à Rechicourt, au sud­-est, le long d'une ligne passant entre Montmédy et Stenay, entre Etain et Verdun, et par Thiaucourt, Pont-à-Mousson et la vallée de la Seille. Les 1ère et 2me Armées américaines étaient déployées entre Sedan et Thiaucourt, devant la Vme armée Von Bothmer alors que, entre Pont-à-Mousson et Lunéville, l'armée Mangin faisait face à la XIXme Armée de Von Mudra, le camp retran­ché de Metz constituant le pivot sur lequel s'articulaient les deux armées allemandes. À cette époque, l'état-major duGénéral Pétain envisageait de lancer une grande offensi­ve en Lorraine, avec 25 à 30 divisions attaquant vers Sedan et Metz puis progres­sant en direction de Mor­hange, Sarrebrück et Trèves. Foch, d'abord sceptique, se rallia finalement au projet de Pétain le 20 octobre 1918 et, le lendemain, ce dernier pro­posa au généralissime que la responsabilité de l'offensive sur Longwy et le Luxembourg fût confiée aux Américains, lesquels étaient engagés de­puis le 26 septembre 1918 dans une vaste opération entre Meuse et Argonne. Après quelques ajustements, le plan d'ensemble de la grande of­fensive de Lorraine fut fina­lement arrêté au début de novembre, mais il ne s'agissait alors que de contourner le système défensif messin et non de l'attaquer de front. Car les Allemands avaient renforcé leur dispositif défensif. Celui-ci était composé désormais de quatre lignes principales et s'étendait sur plus de 30 km de profondeur pour former un tronçon de la ligne « Hinden­burg », une ligne fortifiée hérissée de barbelés, de postes de mitrailleuses et d'artillerie sous casemates.

Le 14 novembre au matin, 28 divisions d'infanterie, 12 régiments d'artillerie, trois divisions de cavalerie, la division aérienne du Colonel de Vaulgrenant, successeur du Général Duval, et 600 chars devaient être engagés, la 2me Armée américaine ayant pour tâche d'opérer en couverture face au camp retran­ché de Metz. Dans cette pers­pective, le commandant du corps expéditionnaire améri­cain, le Gén. John 1. Pershing, avait été mis au courant dès le début d'octobre du projet d'offensive en Lorraine par Pétain avec qui il entretenait des relations amicales. Per­shing envisageait d'encercler Metz en attaquant avec la 1ère Armée américaine vers Longwy et Luxembourg, et avec la 2me Armée américaine vers Briey et Trèves, un détachement de six divisions opé­rant sur la rive droite de la Moselle en coopération avec l'armée Mangin qui devait partir à l'assaut de Château-Salins, puis foncer en direc­tion de Sarrebrück et Sarre­louis. Cependant, le chef du corps expéditionnaire améri­cain savait que la ligne de front qui s'étendait de part et d'autre de Metz constituait un obstacle de taille, que la cité messine était réputée impre­nable et que la bataille serait meurtrière. Aussi comptait -il beaucoup sur l'appui des chars et de l'aviation et, peut-­être, était-il particulièrement réceptif à toute idée nouvelle lui permettant d'économiser la vie de ses hommes.

C'est alors que le futur pro­phète américain de la puis­sance aérienne, le Col. Mit­chell, qui commandait l'Air Service de la 1ère Armée amé­ricaine, proposa à Pershing un plan révolutionnaire d'assaut des fortifications de Metz, que Mitchell espérait enlever grâce à une grande attaque aéroportée sur les arrières allemands.


Dernière édition par Roger Bodson le Ven 2 Jan 2009 - 8:44, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyVen 2 Jan 2009 - 8:35

Les premiers « Commandos-Parachutistes »


Contrairement à ce que l'on croit généralement, l'utilisa­tion du parachute à partir d'un plus lourd que l'air est une idée qui avait déjà fait du chemin en 1918. En effet, dès les balbutiements de l'aviation au début du XX' siècle, les avia­teurs s'étaient intéressés au saut en parachute à partir d'un aéroplane. Un Américain, Albert Berry, le 1er mars 1912, à Saint-Louis, exactement au-dessus de Jefferson Bar­racks, était parvenu le pre­mier à effectuer un saut grâce à un parachute lourd et encombrant accroché au train d'atterrissage de son avion. La voilure ne s'était prise ni dans l'empennage, ni dans les nombreux haubans et câbles caractéristiques des machines volantes de l'époque... Un an plus tard, le 19 août 1913, à Chateaufort, près de Ver­sailles, le Français Adolphe Pégoud avait sauté à son tour de son Blériot à 200 m du sol, sous un parachute Bonnet. Heurtant l’empennage de son appareil, il s'était fracturé l'épaule et avait terminé sa chute dans un arbre en jurant qu'il ne recommencerait plus ! En février 1914, à Juvisy, Jean Ors s'était lancé en parachute depuis un Deperdussin.

Pourtant, au cours de la Grande Guerre, même si le parachute de secours avait déjà été expérimenté, aucun des belligérants, à l'excep­tion des Allemands vers la fin du conflit, n'en avait équipé ses pilotes. Ainsi, pendant quatre ans, pilotes, observateurs, mitrailleurs, bombar­diers et mécaniciens navigants avaient partagé sans rémis­sion le sort de leur avion désemparé alors que le para­chute existait depuis plusieurs années. Outre des considéra­tions d'ordre psychologique ­il a même été dit et écrit que certains hauts responsables d’état-major avaient peur que les pilotes n'abandonnent un peu trop vite leurs avions en cas d'attaque, ce retard était avant tout dû au fait que le parachute était encore très encombrant pour un avion de guerre et gênait le travail de l'équipage. Du côté allemand, les réticences officielles avaient été balayées au début de 1918 et le parachute alle­mand de type Heinecke avait sauvé de nombreux pilotes, parmi lesquels Ernst Udet et... Hermann Goring.

À cette époque, l'ouverture du parachute était automa­tique. Un câble était attaché d'une part à l'avion, d'autre part à la ficelle qui fermait le sac contenant la voilure et les suspentes. Ce sac était fixé solidement au harnais du parachutiste et, lorsque celui-­ci se jetait dans le vide, le câble se délovait, se tendait et cas­sait la ficelle. Le sac s'ouvrait alors et laissait sortir la voilure qui se déployait. Sur certains modèles, le câble avait égale­ment pour fonction de tirer la voilure du parachute hors de son sac. Mais le parachute n'était encore qu'un moyen de secours destiné aux aérostiers.

Pourtant, son utilisation au combat, à partir d'un avion, avait été envisagée dès la deuxième année de la guerre. En octobre 1915 en effet, le parachute fut pour la premiè­re fois employé dans une mis­sion de guerre lorsqu'un douanier travaillant pour le service de renseignement français fut parachuté au nord d'Hirson avec pour mission de faire sauter la ligne de che­min de fer Maubeuge-Hirson. Les missions spéciales et les «commandos-parachutistes » naquirent ainsi.

Après les Français, les Alle­mands avaient utilisé le para­chute au cours de missions spéciales et, le 4 octobre 1916 et le 26 avril 1917, les Lieute­nants Von Cassel, FeI May et le soldat Talke avaient été parachutés près de Rowno, sur le front oriental, à 80 km derrière la ligne de front, pour détruire une voie ferrée, un avion venant les rechercher le lendemain.

Au milieu de 1918, trois mis­sions analogues furent encore accomplies par les Allemands sur les arrières du secteur bri­tannique alors que les Italiens larguaient eux aussi des parachutistes, les Lt. Alessandro Tandura, Ferrucio Nicoloso, Pier Arriga Barnaba dans le secteur de la plaine du Serna­glio, derrière les lignes austro­-hongroises, avec pour mission de recueillir des renseigne­ments sur les mouvements de l'ennemi et de les transmettre grâce à des pigeons. «La pré­paration opérationnelle du saut de la mission fut très éla­borée, écrit Henri Le Mire.

La préparation aéronautique fut des plus folkloriques. Qu'on en juge parce qu'en a écrit le Lieutenant Barnaba : « Une seule suggestion nous fut faite: au moment du saut, tenez les jambes fortement unies et ser­rez les dents : Unir les jambes paraissait logique. Mais ser­rer les dents? Je ne compre­nais pas quelle influence cela pouvait avoir sur la réussite du saut. Ce n'est que plus tard qu'on sut que cette recom­mandation était la consé­quence d'une erreur de tra­duction de la note succincte, rédigée en anglais, qui accom­pagnait le parachute... ».

Si le parachute apparaissait déjà de plus en plus comme l'apanage des hommes des missions spéciales, il n'était encore employé que par des équipes très réduites d'un à trois hommes seulement. Il fallut attendre l'été 1918 pour qu'un Français, le comman­dant Évrard, entreprît plu­sieurs missions audacieuses dans les Ardennes avec une petite unité parachutée et parvienne à regagner les lignes alliées avant l'Armis­tice. Il ne s'agissait cependant pas d'opérations de grande ampleur ; la«guerre aéropor­tée » se limitait à des opéra­tions de sabotage ou de re­cueil de renseignements, bien particulières, effectuées par des soldats d'élite spéciale­ment entraînés.

Avec William« Billy» Mit­chell, le concept d'opération aéroportée prit un réel essor lorsque celui-ci formula et planifia pour la première fois une opération aéroportée engageant les effectifs d'une division d'infanterie entière.

C'est le 17 octobre 1918, en fin de matinée et à l'issue d'une réunion d'état-major au QG du général en chef américain installé dans la forêt de Souilly, à une quin­zaine de kilomètres au sud de Verdun, que Mitchell propo­sa son plan audacieux au Gén. Pershing. Ce matin-là, Pershing était pressé: il devait en effet gagner rapidement la ligne de front, à 5 km au nord de Verdun, pour une inspec­tion. Or la réunion d'état­-major dura plus longtemps que prévu car Mitchell tint à exposer en détail à Pershing un projet de bombardement des arrières des lignes enne­mies dans la région de Metz de manière à couper les voies logistiques allemandes et à «encager» ainsi le champ de bataille. Ce projet n'intéressa guère le général en chef amé­ricain qui était obnubilé par la manière d'enfoncer le front devant Metz et fit rapidement comprendre à son bouillant subordonné que, pour lui, la priorité était de chasser du champ de bataille les avions allemands qui venaient mi­trailler et bombarder les tran­chées américaines depuis que la division aérienne française avait été retirée du secteur de Saint-Mihiel et dépêchée, en septembre 1918, en Cham­pagne. Pershing ordonna donc à Mitchell de concentrer ses efforts sur cette tâche puis, une fois cette mission accom­plie, d'envoyer ses pilotes attaquer les concentrations de troupes et les batteries d'artillerie ennemies et recueillir des renseignements sur les mouvements des régi­ments allemands. Mais il était hors de question d'aller bom­barder les forces allemandes à 60 ou 100 km derrière la ligne de front!

Même s'il raisonnait plutôt en termes de bombardement stratégique qu'en termes de supériorité aérienne locale et d'appui aérien rapproché, Mitchell s'empressa d' obtem­pérer. Il ne voulait surtout pas s'attirer les foudres de Per­shing, car il avait encore un autre projet à lui proposer, qui lui tenait particulièrement à cœur.

Il existait, affirma-t-il à un Pershing intrigué, une maniè­re de s'emparer de Metz de façon plus rapide et moins coûteuse en hommes qu'une offensive terrestre classique. L'idée de Mitchell était d'uti­liser 60 squadrons de bom­bardement lourd équipés chacun de 20 Handley-Page 0/400 ou Caproni équiva­lents , les seuls à posséder une capacité d'emport signi­ficative-et de les envoyer lar­guer dans les alentours de Metz, non pas des bombes mais des parachutistes, cha­que avion emportant une sec­tion de 10 à 15 hommes équi­pés de parachutes de type Calthorp «Guardian Angel» (ange gardien).

Pour exécuter son plan, Mit­chell souhaitait disposer de la 1 è Division d'Infanterie amé­ricaine, unité d'élite qui par­ticipait alors à l'offensive entre Meuse et Argonne, et demanda en conséquence à son chef de la retirer des pre­mières lignes, de l'affecter de manière permanente à l'Air Service et de l'envoyer à l’entraînement dans la perspec­tive de sa nouvelle mission. Le projet de Mitchell était très ambitieux puisqu'il prévoyait de parachuter pas moins de 12000 hommes derrière les lignes allemandes! Outre l'effet de masse, Mitchell comptait aussi sur la puissan­ce de feu de cette troupe puis­qu'il projetait de la diviser en sections de dix hommes armées chacune de deux des nouvelles mitrailleuses Brow­ning de 7,5 mm.
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Roger Bodson
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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyVen 2 Jan 2009 - 8:36

Mitchell invente la guerre-éclair


Dans ses grandes lignes, le plan initial de Billy Mitchell était relativement simple: les bombardiers devaient décol­ler de 15 terrains situés à moins d'une heure de vol de Metz, et devaient aussitôt être escortés par des cen­taines d'avions de chasse. Chasseurs et bombardiers devaient ensuite se rassem­bler en des points prédéfinis; il était prévu que les bombar­diers largueraient leurs para­chutistes en une seule vague; une fois au sol, ceux-ci devaient au plus vite gagner des lieux de regroupement qui auraient ensuite été for­tifiés et ravitaillés par air en vivres et munitions.

Formulant déjà la plupart des tactiques qui furent mises en pratique par la suite dans la Blitzkrieg (guerre éclair allemande en 1939), Mitchell projetait en outre d'envoyer, de jour comme de nuit, deux groupes d'avions d'attaque et de bombardiers légers, armés de mitrail­leuses d'ailes et d'un canon léger, mitrailler et bombar­der les tranchées et les posi­tions fortifiées allemandes de manière à ce que les para­chutistes américains pussent atterrir et se regrouper sans être inquiétés. D'autres avions de bombardement léger auraient également été chargés d'interdire les routes menant aux zones de largage américaines, bref « d'enca­ger » le champ de bataille. Mitchell imagina également des actions de détachements parachutistes contre les aérodromes ennemis du théâtre d'opérations.

Le chef de l'aviation amé­ricaine en France n'était pas seulement un grand stratège aérien, c'était aussi un tacti­cien terrestre de génie puis­qu'il proposait aussi de com­biner l'assaut aéroporté sur les arrières de l'ennemi avec une attaque foudroyante de chars sur le front. Mitchell était en effet convaincu que la clé du succès de l'opéra­tion consistait en une offen­sive simultanée causant une telle confusion chez les Alle­mands que les chars suivis par des troupes d’assaut auraient percé facilement le front et fait rapidement leur jonction avec les parachu­tistes, pour envelopper com­plètement les positions alle­mandes.

Bien sûr, Mitchell était conscient des limites de son projet. Il réalisait ainsi que, en raison des blessures à l'atterrissage qui ne manque­raient pas de se produire, des erreurs de largage et des autres problèmes liés à la technique même des para­chutages, une bonne partie des troupes larguées ne pour­rait être immédiatement opérationnelles: «Il est pro­bable que tous n'auraient pas atterri sans problème, écrivit-il par la suite, et que toutes les sections n'auraient pu se regrouper derrière les lignes allemandes. Mais rappelons--nous que nous devions dis­poser d'une puissance de feu de 2400 mitrailleuses et de 12 000 hommes. Si nous avions eu seulement 10 % de cette force en mesure d'atta­quer les Allemands dès leur arrivée au sol, cela aurait été suffisant pour remporter la bataille. »

Lorsqu'il présenta son ébauche de plan au Gén. Per­shing, Mitchell savait qu'il n'avait pas beaucoup de chances d'être accepté. Pour­tant, à la stupéfaction du jeune colonel qui devait être nommé général de brigade à titre temporaire quelques jours plus tard, et malgré des conceptions stratégiques et tactiques que l'on a souvent qualifié de « classiques », Pershing donna son accord pour qu'un plan détaillé de l'opération fût étudié. Il sou­haita aussi que Mitchell for­mulât le plus vite possible les moyens dont il avait besoin, mais termina l'entretien en déclarant que, pour l'heure, il serait déjà très content si les Américains retrouvaient la maîtrise de l'air au-dessus du secteur de leur corps expédi­tionnaire !

Mitchell regagna au plus vite son quartier général et confia aussitôt à son nouvel officier d'état-major, le Major Lewis Brereton - celui qui, en 1944, commanda la 1 st Allied Air borne Army au cours de l'opé­ration Market-Garden aux Pays-Bas -le soin de peaufi­ner son projet dans le plus grand secret, de réfléchir à la coordination avec les Français et les Britanniques et... de trouver les avions et les para­chutes! L'idée de Mitchell était de rassembler tous les avions de bombardement lourd disponibles sur le front et presque tous les chasseurs alliés, y compris ceux qui devaient entrer en service pendant l'hiver 1918. Brere­ton s'attela immédiatement à sa tâche, d'autant plus ardue que tout était à inventer. Comme il le raconta dans ses mémoires, lorsqu'en juillet 1944, le Gén. Eisenho­wer lui ordonna de mettre sur pied un plan d'attaque aéro­portée des positions alle­mandes en France - les troupes devant sauter entre Paris et Orléans, puis autour de Boulogne -, un plan qui devait allier à la fois « imagination et audace » selon les termes du général en chef américain, Brereton ne put s'empêcher de repenser à ce 17 octobre 1918 et à la mission difficile que lui avait confiée Billy Mitchell ce jour-là.

Après la réunion du 17 octobre 1918, tout en exé­cutant les ordres de Pershing pour reprendre la supériorité aérienne au-dessus du champ de bataille, Mitchell deman­da à ce que des unités supplémentaires de bombar­diers lourds fussent envoyées dans le secteur américain. Dans le même temps, Brere­ton se plongea dans de savants calculs de navigation pour déterminer les temps de vol nécessaires aux bombar­diers pour arriver sur l'objec­tif, définit les plans de vol, ­altitude, étagement, forma­tions, etc. - et établit une liste des terrains d'aviation sus­ceptibles d'accueillir ces bombardiers. Il sélectionna ainsi 15 aérodromes assez vastes pour recevoir chacun quatre squadrons de Hand­ley-Page 0/400 : Verdun, Béthelainville, Parois, Cler­mont-en-Argonne, lulvé­court, Souilly, Foucaucourt, Rembercourt, Belrain, Bra­bant-le-Roi, Vavincourt, Toul, Nancy, Colombey-les­-Belles et Neufchâteau, le plus proche de Metz, Nancy, étant situé, par beau temps, pour des avions évoluant à 1000 m et 120 à 140 km/h, à 20 minutes de Metz, le plus éloigné, Brabant-le-Roi, étant à 43 minutes.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, le problème pour Brereton n'était pas de trouver 1200 Handley-Page 0/400 ou appareils de taille équivalente. Le Il novembre 1918, la Royal Air Force avait déjà réceptionné plus de 400 exemplaires 0/400 et un pro­gramme de production de 1500 exemplaires à moteurs Liberty 12 avait été lancé outre-Atlantique, à la Stan­dard Aircraft Corporation. Or, si l'on considère les cadences des usines améri­caines au cours du second semestre de 1918, on peut estimer que, entre octo­bre 1918 et octobre 1919, les Américains avaient la capa­cité de produire 46.000 moteurs Liberty 12 et plus de 23.000 0/400 !

Mais, avant même que Bre­reton n'eût terminé le plan détaillé de l'opération aéro­portée sur Metz, les Alle­mands commencèrent d’évacuer la ville. Le 10 novembre 1918, les deux armées amé­ricaines et l'armée Mangin attaquèrent de part et d'autre de Metz selon un plan préparé par Pershing, mais s'arrêtèrent presque aussi­tôt, l'Armistice étant signé le 11 novembre 1918.
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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyVen 2 Jan 2009 - 8:37

Le plan pouvait-il réussir?

Pour Leroy Thompson, si l'on considère quelques-uns des succès obtenus par les unités parachutistes larguées sur des positions fortifiées pendant la Seconde Guerre mondiale, comme la prise du fort d'Eben-Emaël en Bel­gique par les Allemands, on peut raisonnablement penser que le plan de Mitchell aurait pu réussir. Thompson ajoute par ailleurs que cet assaut aéroporté aurait eu d'autant plus de chance de parvenir à ses fins qu'il bénéficiait de l'effet de surprise car il repo­sait sur un concept et une manœuvre tactiques entière­ment nouveaux et, de la même manière que les chars avaient provoqué la stupéfac­tion dans les rangs allemands lorsqu'ils avaient été engagés au cours de la bataille de la Somme, ces soldats tombés du ciel auraient pu faire pen­cher la balance de la victoire du côté allié.

Techniquement, en ce qui concerne l'avion en lui-même et uniquement l'avion, l'opé­ration était envisageable avec quelque chance de succès, du moins en théorie. En schéma­tisant à l'extrême, trois grands problèmes se posent en effet pour larguer des parachu­tistes à partir d'un avion: le premier concerne la masse de l'appareil au décollage et son centrage; le deuxième, la place et l'encombrement à bord; et le troisième, l'amé­nagement de l'avion et la méthode de largage.

Pour répondre à la première question, on peut raisonna­blement penser qu'un G.I.. avec casque, fusil Springfield, munitions personnelles et parachute - de l'époque ­pesait environ 90 kg sans paquetage, et 120 à 130 kg avec, soit 900 kg pour 10 hommes sans équipement (ce qui correspond à peu près à la charge maximale d'un 0/400), sans compter le poids des deux mitrailleuses et de leurs parachutes et en suppo­sant évidemment, encore une fois, que le fantassin sautât sans équipement individuel.

La réponse à la deuxième question semble moins évi­dente. Le 0/400 était en effet équipé de deux grands réser­voirs de carburant de 590 1 placés transversalement dans la partie haute du milieu de la carlingue entre les ailes, et, juste en dessous, d'alvéoles en nid d'abeilles dans lesquelles venaient se placer les bombes. Il ne restait donc, pour loger 10 parachutistes, que l'empla­cement situé en arrière du poste de pilotage - où se trou­vaient déjà les lance-bombes à main et les batteries - et de l'emplacement du mitrailleur arrière. Ces deux comparti­ments étant très exigus, il est difficile d'imaginer qu'au­raient pu y tenir, par exemple, six hommes équipés et har­nachés à l'avant et quatre à l'arrière.

Enfin, troisième grande question, comment aména­ger l'avion pour le largage? Unecertitude: il était hors de question d’embarquer plus de deux hommes d'équipage, donc aucun mitrailleur; il aurait sans doute fallu démonter les mitrailleuses. Restait le problème de la méthode de largage. Com­ment parachuter dix hommes d'un avion qui n'était pas équipé de portes latérales? Fallait-il faire sortir les hommes par le dessus du fuse­lage ou par des trappes infé­rieures ? Fallait-il les installer sur les ailes? Sur ce point, la meilleure solution consistait à se servir des deux trappes, celle d'embarquement avant et celle du mitrailleur arrière, mais étaient-elles assez larges pour autoriser le passage d'un parachutiste équipé?

Malgré les aspects techni­quement possibles de l'opé­ration, il faut cependant se garder de tirer des conclu­sions hâtives et peut-être faut-il ne pas s'enflammer trop vite pour l'esprit génial et novateur du plan imaginé par Mitchell. Même si le pro­jet de celui-ci nous apparaît en effet aujourd'hui sédui­sant, il convient avant tout de considérer l'expérience très modeste dont on béné­ficiait en 1918 en matière de parachutisme. Par ailleurs, de nombreux paramètres nous sont inconnus pour pouvoir apprécier la faisabi­lité en 1918 de l'opération de Mitchell.
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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyVen 2 Jan 2009 - 8:38

La postérité des idées de Mitchell
Certes, la Parachute Expe­rimental Unit du Major Orde Lees avait bien pensé utiliser le 0/400 pour acheminer des agents à proximité des ter­rains d'aviation allemands situés en Alsace et en Lorrai­ne, soit en les larguant par parachute, soit en les dépo­sant au cours d'un « touch and go » rapide - une opération avait même été prévue pour la première pleine lune de décembre 1918 -, mais seule­ment une, voire deux per­sonnes à la fois, étaient concernées, pas une dizaine.

Certes, en avril 1918, l'Air­craft Repair Depot n° 1 de Farnborough avait déjà réussi à transformer un bombardier 0/400 en avion de transport de passagers en installant 16 sièges dans le fuselage, après démontage de la soute à bombes et des réservoirs de carburant, remplacés par des réservoirs plats montés sous les sièges, mais il s'agissait d'une transformation lourde, assez longue à réaliser, néces­sitant du personnel qualifié et donc difficile à mener rapi­dement sur quelque 1200 appareils.

Mais surtout, le principal problème concernait moins les avions que les parachutes: où trouver en effet plus de 12 000 parachutes ? Comment et où entraîner rapidement les12000 hommes? Et, surtout, qui aurait dispensé cet entraî­nement et quel aurait été cet entraînement? Comment parachuter les armes, en par­ticulier les mitrailleuses pour qu'elles arrivent au sol intactes et surtout pour qu'elles puissent être retrou­vées rapidement? Comment, en tenant compte des moyens de communication de l'é­poque, synchroniser les temps de vol, les altitudes, les vitesses de 1200 bombardiers escortés de chasseurs de types différents décollant de quinze terrains éloignés les uns des autres? Où et comment les regrouper en vol? Où trouver les parachutes nécessaires au largage du ravitaillement et des munitions des soldats parachutés et comment faire pour larguer des charges telles que des caisses? Une fois les 12000 hommes au combat, qui aurait plié les parachutes nécessaires au ravitaille­ment? Dans quels lieux suf­fisamment vastes pouvait-on installer les tables de pliage?

Enfin, et ce n'était pas le moindre des problèmes, comment assurer les liaisons entre les troupes parachutées derrière les lignes allemandes et l'état- major américain?

Bien sûr, le projet de Mitchell n'était pas né d'une illumi­nation, en ce matin du 17 octobre 1918, mais il avait été lon­guement mûri. Depuis 1917 en effet, Mitchell suivait avec attention les développements du parachute et étu­diait soigneusement les rapports expliquant comment certains pilotes allemands dont les avions avaient été abattus avaient pu sauter de leur appareil et ouvrir leur parachute. Aussi, en septem­bre 1918, avait-il demandé à Washington que fût créé une unité de recherches et d'essais pour évaluer les meilleurs parachutes existants, unité à la tête de laquelle il avait sug­géré de nommer James Floyd Smith. Celui-ci avait com­mencé immédiatement ses travaux à Wilbur Wright Field, dans l'Ohio mais, cons­tatant très rapidement qu'il ne devait attendre aucune aide des responsables de ce camp, et que ceux-ci lui étaient même hostiles, il déménagea très vite à McCook Field.

Lorsque l'Armistice fut signé, le projet de Mitchell marqua le pas, de même que les recherches et les essais du centre d'essais de l'Air Servi­ce de l'US Army, à McCook Field. Les études sur le para­chute et ses possibilités d'em­ploi par les militaires n'en reprirent pas moins au début de 1919, lorsque Billy Mit­chell, devenu général et res­ponsable de l'aviation de l'US Army, remania la commission spéciale créée quelques mois plus tôt à McCook Field pour sélectionner les parachutes destinés aux aviateurs, et la confia à un ancien pilote de chasse, le major E. L. Hoff­man. À peine nommé, ce der­nier commença par envoyer des lettres circulaires à tous les parachutistes connus aux États-Unis, cascadeurs se pro­duisant dans les cirques volants ou de rares amateurs, pour les inviter à venir se produire à McCook Field et pré­senter leurs techniques de saut et les améliorations qu'ils avaient pu apporter à leur parachute. Afin d'attirer le plus de monde possible, Hoff­man n'omit pas de mention­ner dans sa lettre que l'US Air Service achèterait les para­chutes sélectionnés.

L'un des modèles retenus lors des essais fut celui de Les­lie L. Irvin, un personnage haut en couleurs qui se pro­duisait alors dans des cirques volants; il était surnommé « Sky High» Irvin, et avait été réformé en 1915 à cause de ses pieds plats. Son parachute était révolutionnaire puisque son ouverture n'était pas automatique mais comman­dée par le parachutiste; il ne tarda pas à équiper toutes les unités aériennes américaines (et à faire fortune), alors qu'en Europe il fallut encore attendre plusieurs années avant que tous les personnels navigants en fussent dotés.

Le 14 janvier 1926, Mitchell prouva enfin la validité du concept d'opérations aéro­portées qu'il avait imaginé huit ans auparavant, en orga­nisant de grandes manœuvres à Kelly Field, au Texas. Au cours de ces manœuvres, des sections de soldats équipés de mitrailleuses furent en effet parachutées et parvinrent à se rassembler et à se mettre en posture de combat trois minutes après avoir touché le sol, sans problèmes majeurs; des démonstrations simi­laires de sauts de groupes armés furent répétées le 24 septembre 1927 à Bolling Field et le 28 octobre 1928 à Anacosta.

Si les manœuvres de Kelly Field, Bolling Field et Anacos­ta n'aboutirent à aucun résul­tat concret du côté américain, elles intéressèrent fortement un observateur russe, le Capi­taine Minov, qui en tira de nombreuses leçons et parvint, par la suite, à convaincre les responsables militaires sovié­tiques de l'utilité du parachute dans la guerre future.

William « Billy» Mitchell était donc décidément un pen­seur et un prophète maudit, qui prêcha dans le désert aussi bien en matière d'unités para­chutistes qu'en matière de bombardement stratégique. Comme beaucoup d'autres prophètes de la puissance aérienne, il dérangeait et aga­çait une grande partie de la hiérarchie militaire américai­ne de l'époque, et, jusqu'à sa mort en 1936, même s'il conti­nua inlassablement de déve­lopper dans des livres et des articles ses conceptions quant aux possibilités du parachute et des armées aéroportées, il ne put décider l'US Army à créer des troupes aéroportées.

Par une certaine ironie du sort, il fallut attendre le mois de juin 1940 - soit plus d'un mois après que les Fallschirm­jäger allemands eurent sauté sur les Pays-Bas et la Belgique - pour qu'une petite unité de parachutistes volontaires commençât son entraîne­ment aux États-Unis, 22 ans après qu'un Américain en eut exprimé l'idée.
F.P.



LES DÉBUTS DES TROUPES D'ASSAUT

Mitchell avait parfaitement compris une évolution capitale des méthodes de combat de la Première Guerre mondiale, qui apparut en 1918. Au cours de cette année en effet, dans un camp comme dans l'autre, nombre de responsables militaires prirent conscience que les attaques menées par des divisions ou des régiments entiers n'avaient que peu de chances d'aboutir, et qu'iI était préférable d'organiser les divisions et les régiments en petites unités d'assaut rapides et mobiles du type escouades (squads) ou sections (platoon) sur le modèle des Stosstruppen (troupes d'assaut) allemandes, dont la force résidait dans la cohésion du groupe et la personnalité, le charisme du chef; chacune de ces formations élémentaires d'une vingtaine d'hommes disposait non seulement d'une ou deux mitrailleuses, mais aussi d'un homme armé d'un fusil-mitrailleur, d'un bon lanceur de grenades et d'un bon tireur au fusil lance-grenades.
F.P.
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Roger Bodson
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Roger Bodson



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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyVen 2 Jan 2009 - 8:43

Désolé, un "­" parasite se place dans certains mots du texte et je ne sais comment les enlever. Cela n'apparait pas en prévisualisation.
J'espère que cela n'enlève rien en la clarté du texte.
Amitiés paras Roger

Je pense avoir réglé le problème de bug....c'est clean maintenant! Admin
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Devevey
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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyLun 29 Juil 2013 - 17:32

Très intéressant, merci Roger Bodson!

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MessageSujet: Re: 12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!!   12.000 parachutistes pour libérer Metz en 1919!!! EmptyLun 29 Juil 2013 - 20:13

Merci pour ces infos de cet impressionnant parachutage...
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