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| Afghanistan : commandos français en territoire ennemi | |
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Philippe MULLER Expert
| Sujet: Afghanistan : commandos français en territoire ennemi Dim 20 Fév 2011 - 21:39 | |
| lefigaro.fr 18/02/2011 | Mise à jour : 18:24 a écrit : - Citation :
Base de Tagab, 23 heures. Le lieutenant rappelle les consignes à toute la section rassemblée. A sa gauche, de profil, l'adjudant qui commande le groupe Noir Deux. (Éric Bouvet/VII Network)
Le photographe Éric Bouvet a suivi l'élite des troupes de montagne dans leurs missions d'infiltration et de reconnaissance en zone taliban.
Nom de code de leur section: Noir. Ces hommes-là sont des nocturnes. Leurs missions commencent quand tout est endormi. Lorsqu'ils ne partent pas à pied de la base, ils montent dans des véhicules à l'avant blindé (VAB) qui les transportent tous feux éteints avant de les déposer dans la nature. Furtifs comme des bombardiers américains, ils s'infiltrent en terrain hostile, préparent l'offensive de leurs camarades et cherchent à repérer caches d'armes et tireurs isolés. Agiles, rapides, sportifs, lestés de 40 kilos de matériel, ils gravissent en silence les pentes caillouteuses, cheminent à l'abri des arêtes et bravent les précipices, comme les chamois qu'ils aperçoivent quand ils s'entraînent dans la Tarentaise. Ces soldats d'élite appartiennent aux groupements commandos de montagne (GCM) du 7e bataillon de chasseurs alpins de Bourg-Saint-Maurice, arrivé en Afghanistan en novembre dernier.
Dans la province de Kapisa, à 70 kilomètres au nord-est de Kaboul, où les Français sont déployés depuis 2009 dans le cadre de l'Isaf (International Security Assistance Force), l'objectif de l'Otan consiste à sécuriser la route du sud, baptisée MSR. Un axe commercial primordial pour l'économie afghane en général, et pour cette riche région agricole en particulier. Afin que le commerce et les échanges reprennent comme en temps de paix, les vallées adjacentes sont reconquises une à une par les forces françaises flanquées de l'armée nationale afghane. D'abord celle d'Afghana et celle d'Alasay et, à présent, celle de Bedraou. L'opération «Storm Lightning» déclenchée le 29 janvier dernier était destinée à la prise de contrôle de cette large combe verdoyante hantée par des groupes de talibans.
http://www.lefigaro.fr/international/2011/02/19/01003-20110219ARTFIG00009-afghanistan-commandos-francais-en-territoire-ennemi.php
A Tagab et à Nijrab, les deux bases opérationnelles avancées, les plans d'attaque ont été préparés avec minutie. Quand les deux groupes de la section Noir - Noir Unité aux ordres d'un jeune lieutenant et Noir Deux commandé par un adjudant chevronné - reçoivent leur ultime briefing derrière les murs de Tagab, les vingt hommes sont déjà équipés: visage maquillé, bandana sur la tête, pistolet plaqué contre la poitrine, micro et oreillette individuels prêts à communiquer. Le chef de section ressasse les consignes une dernière fois. Il répète l'horaire, l'itinéraire, l'objectif et les règles de sécurité. En cas de coup dur, il explique à nouveau le dispositif d'exfiltration. Quelques minutes plus tard, deux VAB quitteront la base et s'enfonceront dans la nuit, chargés chacun de 10 hommes.
La nuit est sombre. Contrairement à une mission effectuée quelques jours plus tôt, le clair de lune ne suffit pas à éclairer les pas des commandos. Pour progresser à cette vitesse, les soldats doivent utiliser leurs équipements de vision nocturne. A travers ces lunettes, tout est vert, et le relief n'apparaît plus. Quand ils crapahutent dans la pente, évitant les sentiers et choisissant les itinéraires les plus improbables pour dérouter cet ennemi qu'ils appellent « insurgés », les chasseurs trébuchent donc fréquemment. Mais même les chutes s'effectuent en silence: pas le moindre juron. On se relève et on repart sans un mot. L'objectif se situe sur un col à plus d'une heure de marche. De ce point d'observation avancé, les GCM vont à la fois scruter le terrain vers lequel se dirigent les bataillons français Richelieu et Allobroges, engagés dans l'opération «Storm Lightning», et veiller à ce que les talibans n'amènent pas des renforts de la vallée d'à côté. Les hommes surveillent donc les deux versants du col.
L'opération «Storm Lightning» a démarré. Perchés au-dessus d'un col depuis la nuit, les soldats du groupe Noir Deux scrutent tous les mouvements dans la vallée pour protéger l'avancée des troupes. (Éric Bouvet/VII Network)
Pendant vingt-quatre heures, à l'abri des rochers, planqués sous des filets de camouflage, les commandos de montagne vont informer au fur et à mesure de leur progression les troupes lancées à la reconquête de la vallée de la Bedraou. Ils veillent notamment sur les pistes qu'ils empruntent, car les talibans cherchent systématiquement à y placer des engins explosifs qui sautent au passage des militaires. Tandis que les uns scrutent chaque mouvement dans la vallée, les autres se reposent au creux des rochers. Les factions excèdent rarement une heure, pour éviter les baisses de concentration. Chaque groupe comprend un tireur d'élite, au cas où il faudrait éliminer un ennemi embusqué. Quand l'opération est terminée, les GCM repartent également de nuit, sauf si le chemin du retour a été «nettoyé» entre-temps.
«Storm Lightning» a duré jusqu'au 7 février et a finalement permis de faire sauter le «verrou de Jangali», considéré comme un sanctuaire des talibans. Plus de 1800 soldats et policiers y ont participé. Désormais, le bataillon français Allobroges est installé dans cette zone (où les Soviétiques n'avaient pas mis les pieds pendant leur occupation du pays) avec l'armée et la police afghanes.
Les commandos de montagne participent aussi aux missions dites STU (Search Task Unit), qui consistent à saisir des armes et à s'emparer de ceux qui les cachent. Lancées sur la foi de renseignements, ces opérations se mènent en coopération avec des unités spécialisées qui assistent les forces afghanes. Les GCM n'opèrent pas les saisies ni les arrestations. Ils prennent position autour de l'objectif de la mission (ferme, hameau, jardins, vergers...) pour couper la route à toute fuite ou, au contraire, empêcher l'arrivée de renforts insurgés. Ces actions «coup de poing» nocturnes doivent être menées rapidement, car elles ont lieu en zones sensibles. Dans le cadre de «Storm Lightning», de nombreuses armes, légères et lourdes, ont été récoltées ainsi que des stocks d'explosifs destinés à fabriquer des engins improvisés. Un détonateur a même été découvert dans le berceau d'un enfant...
En mai prochain, les commandos de montagne regagneront la garnison de Bourg-Saint-Maurice avec les autres hommes du 7e BCA. Ils quitteront ainsi les pentes pierreuses de l'Hindu Kush pour retrouver les alpages du Beaufortin. Surnommé «bataillon de fer et d'acier», le «7» aura, loin du pays, inscrit de nouveaux faits d'armes à sa légende.
Par Jean-Marc Gonin
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